vendredi 7 décembre 2012

Haïti : Les déchets

Attention : post pas très rigolo ^^

Dans mes premières impressions sur Haïti lors de mon arrivée, outre la boue et le petit air de chaos qui régnait dans l'air, c'est surtout l’amoncellement de déchets ici et là qui m'avait frappé. Que ce soit au bord des routes, dans les cours intérieures, autour des maisons et même dans la nature entre les arbres et dans les cours d'eau, ces déchets sont omniprésents, disséminés, éparpillés. D'où la question habituelle : pourquoi ? Est-ce une habitude de ne pas regrouper et traiter ces déchets? Une volonté ? Pas d'autre manière de faire ?

Comme bien des sujets, la réponse n'est jamais unique, sans équivoque. Néanmoins, à Carrefour Vert, il n'y a pas de collecte des déchets... ce qui rend les choses difficiles! Dès lors, les détritus, constitués majoritairement par les sachets plastiques pour l'eau et emballages de nourriture, sont jetés en bordure de route ou dans la nature et les cours d'eau pour les moins scrupuleux. D'autres, bien plus encombrants, comme des carcasses de camions, des pelle-mécaniques ou encore des bus gisent par endroits comme des navires échoués, certainement car leurs propriétaires n'ont pas les moyens financiers pour les déplacer. Ou alors c'est qu'ils permettent de s'approvisionner en pièces détachés et constituent une sorte de magasin à ciel ouvert.

Qu'en est-il à Port-au-Prince, la capitale? Pas franchement mieux de prime abord. Un immense champ de déchets trône d'ailleurs à l'entrée de la ville et pourrait laisser à croire que les déchets sont rassemblés là à ciel ouvert.

Néanmoins, il semblerait quand même que dans cette ville ceux-ci soient réellement collectés. A savoir de quelle manière, où et à quelles fins? Aucune idée :-). Néanmoins, quand je vois les “cours d'eau” de la ville transformés en dépotoirs géants où s'amoncellent tous ces cadavres de plastique jetés à terre et drainés par les dernières pluies, ça me fait mal au ventre. D'une part car ceux-ci représentent une pollution visuelle mais qu'ils affectent l'eau et les nappes phréatiques dans lesquelles les haïtiens viennent ensuite puiser l'eau pour se nettoyer ou cuisiner.
Il est néanmoins à noter que les haïtiens produisent très peu de déchets en regard de leur nombre (10 mio d'habitants). Certes, c'est également parce qu'initialement ils possèdent moins, mais aussi parce que le recyclage actif des objets pour d'autres usages est fréquent. La tôle de la boite de conserve qui sert de râpe en est un bon exemple, tout comme j'ai pu découvrir des gentes de voiture transformées en pied de parasol ou de tente grâce à quelques soudures habiles. Par personne, les occidentaux doivent en produire une quantité autrement plus grande dû à nos industries mais surtout à notre rythme et style de consommation qui se désintéressent totalement du volume de déchets engendrés au profit du rendement financier maximum. 


Pour en revenir à Monsieur, Madame tout le monde, il semble que dans leur majorité, ceux-ci rassemblent les déchets en un endroit et finissent par les brûler périodiquement pour s'en débarrasser. Eh oui, c'est la seule manière d'éliminer des restes de carton ou d'emballages plastiques puisque personne ne les récupère. D'ailleurs, chez nous aussi les déchets sont brûlés si l'on y pense. A l'exception près qu'ici les fumées dégagées ne sont pas filtrées, même si ce n'est pas leur priorité.

Cette pratique de regrouper systématiquement ses détritus et les brûler évite leur dispersion dans la nature et ainsi une pollution supplémentaire (on connait les dégâts considérables des sacs plastiques sur la faune aquatique dans de multiples zones) tout en évitant de vivre au milieu de ceux-ci.

Malheureusement, cet état d'esprit n'est pas général et une situation particulière que j'ai pu voir en direct m'a particulièrement interloquée. Lors de la préparation d'un repas de midi, les femmes avaient ouvert des boites de conserve et vidé le contenu dans leur marmite. Les enfants, jouant par là, vinrent les prendre et après un moment les jetèrent un peu plus loin, dans les herbes à gauche ou la forêt de bananier à droite. Tout cela sous le regard de leur maman sans que cela ne les fassent sourciller. Des boites en aluminium éventrées qui allaient rouiller et se détériorer là, en plein où les gens passaient et les enfants jouaient, représentant un risque constant de blessures couplée avec une méchante infection alors qu'ils ne sont déjà pas les mieux équipés pour les soigner. Et ces boîtes sont encore là, un mois plus tard suivant leur lente dégradation ocre. Ce comportement est donc à la fois peu protecteur envers sa progéniture mais également irrespectueux envers une nature qui les nourrit abondamment, les protège et leur offre un cadre de vie exceptionnel. Alors certes l'Etat ne prévoit pas de ramassage ce qui n'incite pas les gens à le faire non plus mais sur le principe le fait de voir des déchets dans la nature devrait au moins interloquer n'importe qui.

Mais comme je l'ai dit, le rassemblement des détritus semblent néanmoins être l'action de la majorité (en tous cas à la campagne) et cette action est décrite et encouragée dans les manuels scolaires des écoliers haitiens. Une habitude répandue est d'ailleurs de balayer fréquemment son terrain et son tour de maison pour le rendre propre (et pour certains de pousser plus loin les objets que l'on ne veut ramasser).

Il n'empêche que ce processus devrait être général chez tous car il demande un effort minimum, est d'une facilité déconcertante, ne coûte rien et permet de vivre dans un environnement plus propre, plus sécurisé, plus sain tout en diminuant la pollution et les risques de maladie.

Il n'empêche que dans son processus de développement, l'accroissement des déchets et la pollution dans son ensemble seront des points critiques auxquels Haïti devra faire face.

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