mardi 13 novembre 2012

A la plage !

Outre le cataclysme sanitaire et humain engendré par le tremblement de terre de 2010 en Haïti, celui-ci a également engendré la disparition quasi totale du tourisme sur l'île, qui décroissait déjà depuis plus de trente ans. Ceci est d'autant plus fâcheux que les haitiens auraient besoin de cette manne financière amenée par les touristes pour aider leur économie à repartir et surtout pour créer à nouveau les emplois perdus. Mais d'importants investissements sont actuellement entrepris par l’État et des partenaires privées pour que les croisières fassent à nouveau escale sur les plages haïtiennes, de nombreuses plages soient réaménagées et de grands centres balnéaires de vacances soient construits dans le but de faire doubler la capacité d'accueil des hôtels (de 1750 chambres à 3000 chambres). Dure tâche que de redevenir attractif.

Il n'empêche que Haïti n'a pas perdu ses belles plages de sable pour autant et c'est tant mieux car la semaine passée, j'ai eu la grande chance de pouvoir aller deux fois à la mer (et oui c'est une mer, celle des Caraïbes) : une fois au nord de Léogâne et ensuite au sud, à Jacmel.

Ces deux expériences m'ont laissé un sentiment contrasté, contradictoire. L'arrivée à la première plage était des plus “classiques” si j'ose dire avec un premier voyage de cinq minutes en moto-taxi jusqu'à Léogâne avant de prendre un tap-tap pour une quinzaine de minutes vers le nord où celui-ci nous déposait en bord de route. Étonnamment nous fîmes le reste du chemin à pied ce qui était fort agréable depuis le temps que je n'avais plus utilisé ce qui me sert habituellement de jambes. Les paysages étaient toujours aussi magnifiques avec cette végétation luxuriante en tout endroit mais les maisons de toiles construites en amas sur des terrains boueux nous rappelaient la dure réalité de la vie quotidienne. A l'approche de la plage, un grand portail nous barrait la route, faisant office d'entrée pour accéder à celle-ci. Et de plus payante ! Pas que je sois radin (quoique des fois...), mais il me semble que la plage est un lieu totalement public et que, de ce fait, son accès doit être libre pour les citoyens du pays en tous cas. D'autant plus que le prix d'entrée était fortement dissuasif pour une personne locale. Il semblerait (je dis bien il semblerait) que l'accès à la plage soit libre mais que de petits malins aient construits sans autorisation une petite infrastructure sur cette plage et qu'ils demandent depuis une taxe d'entrée pour le soit-disant service qu'ils offrent (nourriture, boisson, musique,...). Quand le gouvernement ne surveille pas... enfin bref.


Avalé bon gré mal gré la pilule, nous entrâmes donc dans l'enceinte pour aller se baigner. Toutes ces petites maisons blanches en toit de chaume qui jouxtaient (100 points au scrabble ça ^^) la plage semblaient comme sorties d'un catalogue de voyage de rêves. Mais connaissant maintenant Haïti et la situation des familles qui habitent à deux pas de là, ça me donnait plutôt une vieille boule au ventre.


Bref, j'essayais de passer outre cela et me rappelais aux bons souvenirs des journée à la plage d'Hauterive ou de St-Blaise en me jetant dans l'eau comme si je n'en avais plus vu depuis des années. Température chaude, salée au poil, vue méditerranéenne d'un côté (ie rien à l'horizon) et paradisiaque de l'autre avec palmier, sable et grand soleil. Une parenthèse rafraîchissante et extrêmement agréable autant au propre qu'au figuré.
Et ce n'est pas tout car 4 jours plus tard, afin de faire visiter la ville de Jacmel à sa tante Geneviève avant son départ, David nous avait concocté une virée à la mer en voiture mais au sud de l'île cette fois-ci. Autant dire tout un programme. Nous commençâmes avec une crevaison après seulement 5 minutes de route mais heureusement ce fut le seul hic de la journée. Une seule route mène à Jacmel depuis le nord et elle passe par...la montagne ! Youhouhou. Plus on prenait de la hauteur, plus je me sentais à l'aise dans ces magnifiques paysages montagneux. A cause d'une déforestation partielle des forêts pour principalement produire du charbon, les sommets étaient d'une part assez peu boisés mais surtout érodés et donc lisses alors que nous n'étions même pas à 1000m d'altitude. Cela a d'ailleurs des effets néfastes sur les villages de plaine comme de montagne qui sont sujets à des coulées de boue dévastatrices et qui sont problématiques car elles nécessitent de gros moyens (comme des véhicules de chantier) pour être évacuées (d'une route par exemple). A ce propos, la route était d'une qualité remarquable à la montée et plutôt jonchée de nids de poule en descendant sur Jacmel.
 

Rue de Jacmel
Surplace, nous pûmes nous faire une idée de cette ville très réputée pour sa beauté et sa culture. Pour ce qui est de la beauté, les stigmates du tremblement de terre sont encore trop visibles pour se faire une vraie idée de ce qu'était la ville avant. Pour la culture, nous avons visité quelques galeries d'art local où masques d'animaux à grande langue côtoyaient des tableaux de plantations de canne à sucre au coucher du soleil. Il y avait vraiment de beaux objets.
 
 
Puis nous nous dirigeâmes vers l'est cette fois-ci pour aller dîner dans un hotel-restaurant de bord de mer dont la plage en contrebas semblait également sortie d'un guide d'agence de voyage. Autant dire que la baignade fût fort appréciée et que le repas d'après également (surtout pour sa vue superbe). Le retour par la montagne au crépuscule clôturait cette journée de manière idéale.
 
Vue depuis le restaurant (plage en contrebas)
 
Retour par la montagne :-)

Sentiment contrasté je disais ? Oui, car j'ai encore de la peine à concevoir que des endroits aussi idylliques et luxueux soient construits alors qu'une grande quantité de gens sont dans une situation si précaire. Une sorte d'exhibition pertinente de richesses et de faste dont l'étendue est d'autant plus renforcée par la pauvreté environnante. Mais pour attirer des touristes, c'est ce genre de bâtiments qu'il faut construire, c'est ce genre de lieux qu'il faut aménager. Car les touristes et l'argent qu'ils dépensent surplace permettent de créer des emplois, de donner du travail aux haïtiens et ainsi d'améliorer leur condition. Cela permet encore de créer des petites entreprises (transport, restaurant, loisirs,...) et de faire venir d'autres investisseurs pour qu'au final les recettes de l’État augmente et qu'il puisse investir (ça,ça reste à voir) dans des domaine comme l'éducation, la santé, les routes, le réseau électrique ou le tourisme pour ne citer que ceux-ci.

Mais ce luxe ostentatoire est paradoxalement et quoiqu'on en dise une nécessité pour améliorer à terme la situation d'Haïti.

P.S. Désolé de placer des mots compte triple un peu partout mais vu qu'on a une langue riche, je m'amuse un peu à utiliser des termes qu'on emploie rarement voire jamais dans une conversation ;-D.

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